Une des très nombreuses leçons à tirer de la guerre d’Afghanistan est la faillite totale du concept d’hélicoptère d’attaque avancé. 

On le savait un peu depuis la guerre du Vietnam malgré les bonnes prestations du Cobra AH-1 (en matière de massacre de groupes d’humains éparpillés), puis de façon définitive après l’épisode de l’assaut héliporté désastreux sur la localité irakienne de Nacirira en 2003, un assaut solide mené par des hélicoptères Apache AH-64 fort onéreux contre des fantassins retranchés armés de simples fusils mitrailleurs.

Cet épisode à l’issue duquel aucun Apache ne retourna indemne est fondateur :  c’est à partir de l’assaut sur Naciria que toute la doctrine d’utilisation des hélicoptères d’attaque à été profondément modifiée.  

A un certain moment, le concept même d’hélicoptère d’attaque ne tenait plus la route :  trop fragile, trop vulnérable aux tirs d’armes légères, entretien coûteux, pièces défectueuses de plus en plus nombreuses, vélocité trop réduite, autonomie limitée, électronique et avionique inadaptées aux conditions extrêmes, survivabilité guère meilleure et probablement moindre que celle d’un char de combat, etc.

Les guerres du Mali et de Syrie ont enfoncé le clou.

Dans les conditions désertiques du Sahel, les hélicoptères d’attaque n’ont que très peu de marges. Sinon aucune. Les pannes y sont récurrentes et continuelles malgré le retour en R&D.

Si l’hélicoptère franco-Allemand “Tigre” a eu un effet psychologique dévastateur sur les forces loyales à Laurent Gbagbo en Côte d’Ivoire, cela n’a pas été le cas au Nord Mali, à Kidal ou à Aguelhok où cet hélicoptère ne pouvait même pas y être déployé sans au moins une avarie par jour.

Cette arme a besoin d’un certain nombre de paramètres optimales pour qu’elle soit efficace, voire redoutable. Elle est sinon encombrante.

En Syrie, les pilotes d’hélicoptères d’attaque Mil Mi-28 “Chasseur de nuit” et de KA-52 “Alligator” russes ont poussé les limites de l’extrême jusqu’à survoler à très basse altitude un champ de bataille hérissé de DCA, de missiles Sol-Air portatifs et de mitrailleuses hostiles-une hérésie doctrinale, mais le résultat n’a jamais été concluant.

Des groupes des forces spéciales arrivaient à faire beaucoup mieux.

La doctrine soviétique en matière d’utilisation des hélicoptères d’attaque était claire et rigide :  les chars volants soviétiques étaient destinés à la lutte antichar et accompagnaient le déferlement des divisions soviétiques en territoire hostile.

Cette doctrine a changé mais n’est pas parvenue à maturation. Si les Américains reviennent au galop au “Shoot and Forget” (tire et oublie !) en prenant soin de demeurer hors de portée des armes de l’adversaire, les Russes continuent à chercher la pierre philosophale pour l’emploi optimum de cette arme. Un pari loin d’être gagné.

En Afghanistan, les hélicoptères-tous types confondus- de l’ISAF, la Force Internationale de Sécurité et d’Assistance (en fait les forces US/OTAN+mercenaires privés) s’écrasaient chaque semaine depuis octobre 2001. Au point où les bergers Afghans ont inventé un nouveau proverbe, traduit approximativement comme suit (du Pashtu) : ” le soleil se lève tout seul et l’hélicoptère tombe à terre rien qu’en le voyant.”

En Afghanistan, la géodesie particulière et le climat extrême a forcé le Pentagone a opter pour le robuste Mil Mi-17 russe comme hélicoptère de servitude.

Officiellement, plus de 5607 hélicoptères furent perdus durant la guerre du Vietnam. Soit près de la moitié des hélicoptères engagés.

Le Pentagone reconnaît la perte de 1221 hélicoptères durant ce conflit désastreux.

En Afghanistan, la liste des hélicoptères US, OTAN ou Est-européens abattus, tombés ou endommagés est tenue dans le plus grand secret.

Le chiffre doit être tellement choquant et effarant qu’il risque de mettre fin à l’existence même de la voilure volante.
 

   

3 thoughts on “De l’insoutenable légèreté de l’hélicoptère d’attaque

  1. Brillant article de mon point de vue. Sûr que le syndicat des hélicoptéristes va en faire une indigestion.

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